« La forme de mes récits se calque et se stratifie en un corpus. À l’image d’un miroir qui se définirait comme une utopie, consistant en un lieu sans lieu. Ce miroir permet de nous voir là où nous ne sommes pas, un espace irréel qui s’ouvre virtuellement derrière la surface, une sorte d’ombre qui nous donne notre propre visibilité et qui nous permet de nous regarder là où nous sommes absents.
Lorsque je travaille la surface du papier, dans une tentative de méditation, de réflexion mentale, l’imaginaire éclipse le réel, les formes du passées, historiques, s’entremêlent et se superposent. Dans une illusion cristalline les récits se croisent et se stratifient en une étrange cartographie. L’excellence artisanale du joaillier Fabergé nous fait part de ses créations, croisant deux cygnes enlacés. Blessés, une goutte de sang fera naître la première rose, digne d’une tragédie grecque, sous les regards espiègles des masques de la comedia del’arte. Une cheval blanc et un cheval noir viendront surplomber les cieux pour défendre l’hypothèse de Platon sur les représentations de l’âme humaine. Un cœur mis à nu se retrouve gardé par des renards. Nul doute que tout cela à un sens à qui sait trouver son chemin. Le regard part à la conquête de l’image, engrange ses richesses et à la manière du vaisseau Argo qui à chaque escale changera les pièces du navire, finira par donner une nouvelle forme. La forme de sa propre aventure.
Ma pratique s’articule dans ces illusions, ces absences qui ne font que révéler l’essence même de ce en quoi nous croyons. Dans une pratique artisanale, je créée des objets, travaille et me penche sur les différents corps de métiers qui ont su basculer grâce au regard novateur de ses pratiquants à travers l’histoire. Antonin Carême, pâtissier architecte, Paracelse médecin alchimiste, Nicola Sabbattini architecte scénographe, Georges Méliès magicien cinéaste, etc... »