Opéra
Sam Krack
L’idée d’« Opéra » ne pourrait pas être plus éloignée de ce qui définit la série que je présente pour cette exposition. Elle se situe tellement à l’opposé que je me retrouve dedans assez facilement. Dans l’imaginaire collectif cette notion d’opéra renvoie au grandiose, au spectaculaire, à la mise en scène parfaite où rien n’est laissé au hasard. L’opéra impressionne, impose, il marque les esprits. L’univers que j’essaie de faire exister à travers mes peintures se définit avant tout par son ordinaire et sa banalité. Ce sont de petits instants de rien du tout à peine visible, maladroits, noyés dans la masse et voués à la disparition. Des endroits vides, dénués de toute présence humaine, tel des décors qui attendent d’être habités. Des gens qui tentent de disparaître au profit de l’objet qu’ils essaient de mettre en valeur. Pas de maquillage, pas de costumes, pas de scénario. Juste une fenêtre aussi fidèle que possible sur la modestie du réel.
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S.K. août 21
Samuel Spone
Pendant longtemps j’ai eu deux manières de faire, il y a une séparation nette entre le dessin et la peinture, le dessin généralement est peu accidenté, assez géré, détaillé. J’ai toujours dessiné c’est un domaine dans lequel je suis assez à l’aise. Ma peinture s’apparente au graffiti, à ce que je faisais dans la rue. Donc mes peintures, étaient comme une retranscription abstraite des tags que je faisais dans la rue. Dans ces peintures il fallait conserver l’énergie pure de ces instants où tu peins dans la rue, sur une voie ferrée ou sur l’autoroute et que tu dois, malgré les voitures qui passent, malgré la pression, être focalisé 15 secondes sur ce geste qui doit être exécuté parfaitement. J’avais pas mal lu sur la philosophie de la peinture chinoise, qui parle de gestes parfaits. Je faisais un parallèle direct entre le tag et la calligraphie chinoise.
J’ai commencé à peindre par soustraction en utilisant de l’eau de Javel pulvérisée qui attaquait la matière en décolorant la toile. Je peignais à l’aveugle car la décoloration n’est pas instantanée.
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Extrait d’un entretien avec C.L. août 21
Gaétan Vaguelsy
Peindre pour moi est un défi, comme un défi sportif. Arrêter de grapher pour passer à la peinture figurative était pour moi l’évolution la plus ambitieuse ! Je pars de mises en scène construites sans folklore ni déguisements. Je représente des codes, ceux de ma génération, il y a un côté hip-hop dans mon travail, je représente les miens. Mes potes délirent sur les modèles de chaussures ou sur les vestes, ils les reconnaissent. Ils se sentent pris en compte directement par les codes représentés dans la peinture. La tension qui est présente est maquillée, elle est maquillée par des bonbons et des trucs assez enfantins. Ces bonbons, ces petits objets, c’est juste pour se faire plaisir, ça fait partie de la condition de n’importe quel humain. Je fais des photos comme je fais des croquis, en gros je sors mes personnages du monde réel. Dans mes peintures je souhaite supprimer le contexte, il n’y a pas de fond derrière les personnages. J’ai commencé très vite à ne pas représenter le contexte ou alors à faire des monochromes. Je ne veux pas qu’il y ait d’espace réel pour proposer un face-à-face universel entre humains.
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Extrait d’un entretien avec C.L. août 21